Demain à l'aube il sera pendu.

Mais on lui a fait cette grâce qu'avant de mourir il pourra dire devant le peuple un dernier poème. Il se disait dans son cachot: Jusqu'ici je n'ai fait que des chansons pour amuser. Ce sera mon premier et mon dernier poème.
Je leur dirai
Prenez ces paroles, qu'elles ne soient pas une graine perdue! Couvez mes paroles, faites-les croître, faites-les parler! Mais que leur dirai-je ensuite? Je n'ai qu'un mot à dire, un mot simple comme la foudre. Un mot qui me gonfle le coeur, un mot qui me monte à la gorge, un mot qui tourne dans ma tête comme un lion en cage. Ce n'est pas une parole de paix. Ce n'est pas une parole facile à entendre. Mais elle doit mener à la paix, mais elle doit rendre toute chose facile à entendre, pourvu qu'on la prenne comme la terre reçoit la graine et la nourrit en la tuant. Quand je serai pourri, dans quelques jours, que de ma pourriture sorte un arbre à paroles. Non pas des paroles de paix, non pas des paroles faciles à entendre, mais des paroles de vérité.

Mais encore, que leur dirai-je?