LE JOUR DES LIBÉRÉS

J'ai visité l'armée des libertés perdues,
Ouvert les lourdes portes des vertes amours mortes.
J'ai réveillé de tendres et douces cohortes,
Et tous ces prisonniers qui ne se sont rendus.

Nous marchons tous ensemble et sans direction;
Nous avançons, aveugles, avec précision
Vers les villes assiégées où nul n'est rentré.
Nous traversons les temples que nul n'a pénétré.

Nous possédons la clé des granges grillagées,
Connaissons les rivages où nul n'a fait naufrage,
Ces plages enneigées où nous avons nagé.

En nos coeurs dénudés couvent des feux sans rage.
Nous parlons une langue connue de tout le monde :
La langue de l'espoir que nous pensons féconde.

Julien Mannoni